… Palestine 6 … que faire ?

l’un des textes qui nous étaient proposés fin octobre, en Luc 12 51 à 53, montrait Jésus disant : « croyez-vous que je suis venu apporter la paix sur la terre ? non, [je suis venu apporter] la division ; car désormais cinq dans une maison seront divisés, trois contre deux, et deux contre trois ; le père contre le fils et le fils contre le père … »

au regard de la situation de son pays, c’est plutôt réussi …

la Palestine est le lieu d’un conflit qui empoisonne – outre ses acteurs – les relations internationales depuis 65 ans tant il est à l’origine de la plupart des guerres et actes terroristes émanant de cette région du Monde …

un conflit que les 2 parties ne peuvent résoudre : Israël ne veut pas payer le prix de la une paix – l’évacuation des territoires – et les palestiniens sont minés par la division, l’impuissance et la corruption

un conflit que l’arbitre possible – les Etats Unis – empêtré dans une idéologie qui le pousse à soutenir Israël quoi qu’il arrive, ne peut arbitrer

un conflit de plus en plus inextricable à cause de la poursuite de la colonisation

la clef est clairement du côté d’Israël : reprendre la négociation « paix contre territoires » ne dépend que de l’arrêt de la colonisation ; pour faire bouger les lignes, il faut la rendre impopulaire dans l’opinion israélienne

pour cela, il faut l’aider un peu ; l’exemple Sud-Africain – qui n’était pas moins compliqué – démontre que la pression internationale, par le moyen du boycott, peut aboutir à déverrouiller une situation bloquée

un premier objectif, qui nous concerne directement, peut être d’obtenir la reconnaissance de la Palestine comme pays par la France – après la Suède qui vient de le faire – puis par l’Union Européenne et par l’ONU

Daniel Gendrin

… Palestine 5 … le colosse aux pieds d’argile

seul vainqueur, Israël ? pas si simple …

militairement, le pays ne survit que grâce au soutien, financier et militaire des Etats Unis ; les guerres du Kippour et du Golfe l’ont montré lorsqu’il a fallu, en catastrophe, secourir Israël en danger

jusques à quand ? l’explication d’un lobby juif qui dominerait le Sénat des USA ne me paraît pas suffisante ; ce sont les intégristes protestants – qui dominent la pensée politique américaine – qui soutiennent pour des raisons religieuses (Terre Promise et autres balivernes), la politique du Grand Israël … mais l’intégrisme, ici comme ailleurs, aura son temps ; Israël pourra alors se faire du souci … dépendance …

démographiquement, Israël a besoin, pour survivre, à cause du développement de la population arabe dans les territoires occupés, d’une immigration juive continue et en nombre… là encore, dépendance …

politiquement, Israël est dans l’impasse :

si une paix négociée est la seule issue définitive possible, il n’y a plus guère d’israéliens pour avoir encore confiance dans cet aboutissement – fruit du choix du terrorisme par les palestiniens et de leurs atermoiements

par ailleurs, le système électoral proportionnel en vigueur favorise l’émiettement de la classe politique et met au pouvoir des extrémistes de tous poils bloquant toute velléité d’avancer vers la paix

enfin, sous la pression de ces mêmes intégristes, Israël s’obstine dans une politique de colonisation des territoires occupés qui rend de plus en plus improbable la perspective d’une solution à 2 Etats

c’en est au point qu’Israël a fait le choix de s’enfermer soi-même dans un mur …

la colonisation qui se poursuit rend légitime la comparaison avec le régime d’apartheid autrefois en vigueur en Afrique du Sud ; Israël s’en défend becs et ongles ce qui ne change rien à la réalité des faits

… Palestine 4… l’échec du terrorisme …

restent face à face, à la fin des années 70, Israël et les organisations palestiniennes

elles se sont constituées, dans les années 50, pour aider les réfugiés ; laïques, elles sont soutenues par les pays arabes, surtout la Syrie et les pays du Golfe, et par les pays de l’Est

devant l’impuissance des armées arabes – et parfois chassées par elles, comme en Jordanie en 1970 – elles se substituent à elles et passent à l’action … en choisissant l’arme des faibles : le terrorisme

c’est, à nouveau, l’échec : l’opinion internationale n’adhère pas et elles perdent la bataille médiatique

à la fin des années 80, changement de stratégie : Yasser Arafat déclare caduc l’article des statuts de l’OLP déniant à Israël  le droit d’exister ; en même temps la jeunesse palestinienne se révolte et se bat, sans moyens militaires, avec des pierres contre des fusils

pour la première fois, les palestiniens marquent des points : devant les dégâts médiatiques, Israël est contraint à la négociation et concède les discussions d’Oslo qui aboutiront aux accords du même nom

l’assassinat de Rabin par l’extrême droite juive ne met pas un terme à l’espoir mais en juillet 2000 l’échec du sommet de Camp David referme la porte … il semble que, au dernier moment, Arafat ait reculé, achoppant sur la question du droit au retour …

n’empêche … la seule bataille des palestiniens qui ait conduit les israéliens à négocier a été non-violente, bataille longue et meurtrière pour eux mais qui aurait été victorieuse si Arafat avait su conclure à Camp David

ma thèse est que le choix de la lutte armée par les arabes et les palestiniens n’a pas été productive : Gandhi a eu une autre succès, au même moment, en peu d’années et contre un adversaire ni plus ni moins barbare ; mais Arafat n’était pas Gandhi …

notons en passant que jusqu’à la fin des années 80, il n’y a pas la moindre trace d’islamistes ; ils n’apparaissent, pour les contester, que lorsque les négociations s’ouvrent et surtout après leur échec ; ils regroupent ceux qui continuent à vouloir la disparition d’Israël et sont appuyés et manipulés par la Syrie et l’Iran ; ils l’ont été, dit-on, par les services secrets israéliens quand il a fallu affaiblir l’OLP

le terrorisme islamiste moderne est né de l’humiliation arabe, de l’échec de l’OLP et de l’incapacité israélienne à maîtriser son extrême droite

mais en 40 ans, laïc ou islamiste, le terrorisme a échoué à rejeter les juifs à la mer …

… Palestine 3 … le bruit et la fureur …

en 1948, devant l’exode des réfugiés et les exactions commises, la Syrie, la Jordanie et l’Egypte attaquent Israël ; c’est le premier échec

en 1967, Israël, menacé ou non, attaque et conquiert ce qu’on appelle désormais les « territoires occupés » : le Golan, la Cisjordanie (dont la partie Est de Jérusalem) et le Sinaï

en 1973, les Egyptiens et les Syriens attaquent à nouveau, le jour du Kippour ; l’armée égyptienne enfonce, sur le canal de Suez, les lignes israéliennes mais Tsahal, bénéficiant d’un très important soutien américain, redresse la situation et passe le canal ; des négociations s’ouvrent, sous la pression conjointe des Etats Unis et de l’URSS via l’ONU

enfin,  en 1978, l’Egypte et Israël concluent une paix séparée ; la Jordanie se retire du combat ; la Syrie seule n’est plus un danger pour l’Etat hébreux

mentionnons, plus tard, les 2 guerres menées par Israël au Liban ; autant de tentatives de régler par la force la question palestinienne, contre l’OLP d’abord et le Hezbollah ensuite ; la première est un succès militaire et un échec politique et la deuxième se terminera piteusement sans victoire militaire pour l’armée israélienne

ne parlons pas des interventions plus récentes – 3 ou 4, je ne sais plus, en moins de 10 ans – de l’armée d’Israël à Gaza qui n’aboutissent qu’à des victoires illusoires contre une prison à ciel ouvert dirigée par le Hamas un parti prétendument de Dieu qui conduit son peuple à l’impasse

autant de guerres autant d’échecs pour les pays arabes et si l’Etat israélien semble bien s’en tirer – il a gagné presque toutes les batailles et conquis une grande partie d’Eretz Israël – il se condamne, on y reviendra, à une guerre perpétuelle

la première conséquence de toutes ces défaites est l’humiliation des peuples arabes ; la haine à l’origine des attentats contre les ambassades et les navires américains puis contre le World Trade Center et l’embrasement du Proche-Orient en sont directement issus

… Palestine 2 … le péché originel

1948 c’est, pour tout le monde, la fin d’une guerre extraordinairement dévastatrice ; on rebat les cartes de l’Europe, les déplacements de population, en Allemagne et ailleurs, se chiffrent en millions d’individus, la Shoah empoisonne la mémoire des non juifs en Europe et aux Etats Unis …

des milliers de juifs sortent des camps pour ne retrouver rien ni personne chez eux – quand ils retrouvent un chez eux …

certains demandent à émigrer en Palestine où l’ONU a décidé la création d’un Etat juif sur une partie du territoire

au début des années 60, Israël, c’est, pour toute une partie de la jeunesse européenne, une sorte de Far West : un pays de jeunes, les kibboutzim, le développement, la démocratie, le désert qui fleurit etc., un pays qui fait rêver

et je me souviens de ma surprise lorsque l’un de mes frères, plus âgé, m’affirma qu’il trouvait scandaleux que l’ONU ait créé un Etat juif sur cette terre arabe

c’est qu’en effet, cela s’est fait – comme au Far West – sur le dos des habitants de  la région : près d’un million de palestiniens vivaient sur place

fuyant la guerre ou le fusil dans le dos, plus des ¾ d’entre eux partiront pour des camps au-delà des frontières d’Israël …

… Palestine 1 … genèse …

… tout commence avec Abraham il y a 4 000 ans puis viennent Isaac et Ismaël, puis Jacob et ainsi de suite jusqu’à la destruction du temple par Titus en l’an 70 de notre ère …

entendons-nous bien : il ne s’agit pas ici de prétendre à l’historicité des récits bibliques : qu’Abraham, Moïse ou Salomon aient ou non existé  n’a pas d’importance pour nous (on peut, pour un éclairage sur ce point, se reporter, par exemple, à l’excellent livre paru en 2002 chez Bayard, La Bible dévoilée)

mais Abraham – notre grand-père à tous – a quitté Ur pour la Palestine et Moïse y a ramené d’Egypte le peuple élu ; Salomon a construit le Temple à Jérusalem, l’endroit où Jésus, Fils de Dieu pour les chrétiens et juif palestinien, a fini sa vie mais aussi celui d’où Mahomet est monté aux cieux

quelle que soit la véracité de ces récits, la charge symbolique du territoire  est immense pour tous les peuples issus de la tradition du Livre

… tout commence donc avec Abraham …

… en l’an 70, les Romains détruisent le Temple et la Ville ; vient, pour les juifs, le temps de la Diaspora et une bonne partie d’entre eux – de gré ou de force – quitte la Palestine vers Rome, Alexandrie, Babylone ou ailleurs

la Mémoire d’Abraham  – paru en 1983 chez Robert Laffont – raconte superbement l’Odyssée d’une famille fuyant la Palestine et qui, au long des siècles, fait le tour de la Méditerranée : Egypte, Afrique du Nord, Espagne, France, Allemagne, Pologne ; et cela se termine, tragiquement, au ghetto de Varsovie en 1943 …

car au bout de l’histoire on trouve la Shoah, l’incroyable massacre des juifs d’Europe …