ça leur passera avant que cela ne nous reprenne : cette phrase – qui parfois, je le sais bien, énerve prodigieusement – résume ma pensée
d’abord la deuxième partie (« avant que cela ne nous reprenne »)
dans les années 40 ou 50, nos mères ne seraient pas sorties dans la rue « en cheveux » : cela « ne se faisait pas » ; qui de son chapeau, qui de son « fichu » ou de son « foulard », une femme sortait la tête couverte
c’était une injonction coutumière issue d’un précepte religieux remontant, pour ce qui nous concerne, à St Paul et à la tradition juive : une femme doit avoir le maintien modeste et couvrir ses cheveux
je n’imagine pas une seconde mes filles se laisser à nouveau imposer – sinon par la mode – une coutume de cette sorte …
passons au corps de l’affirmation (« ça leur passera »)
pas aveugle, je sais, pour être souvent dans la rue, que le voile des musulmanes est plus porté et plus visible qu’il y a quelques années, y compris chez les jeunes
imposé par la pression sociale ou la famille ou choisi par la jeune fille, elles se soumettent à l’injonction même à laquelle se soumettaient nos grand-mères
ce mouvement de réappropriation d’une coutume sociale ne se limite pas au port du voile (nourriture Hallal, respect du Ramadan, …) ; il correspond, pour la population musulmane vivant en France, à une volonté de se faire reconnaître comme telle
ça leur passera à mesure que sera actée par les non musulmans la présence de l’islam comme une religion française
la désaffection viendra des femmes : elles jetteront le foulard aux orties, comme l’ont fait les chrétiennes et pour les mêmes raisons, dont le refus de la domination des hommes
Daniel Gendrin
PS : un ami médecin nous disait récemment, dans sa clientèle, la très grande proportion de jeunes femmes françaises d’origine arabe ou turque qui divorcent, refusant de vivre avec celui, venant du bled, que leur ont imposé leurs parents …
Tout à fait d’accord avec toi…
Si l’on remonte à 60 ou même à 100 ans , la vie en France et particulièrement la vie des femmes était très différente ( encore plus si on considère la différence entre les villes et les campagnes et le niveau d’instruction )…. et personnes ne le supporterait plus en 2015…
la question est: comment aider , dans le respect des personnes, ces jeunes et moins jeunes musulmanes à vivre heureuses et épanouies , en se sentant à la fois bien dans leur communauté et bien dans la société civile d’aujourd’hui …
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La génération précédente avait déjà jeté leur foulard aux orties. J’étais au Parlement européen avec Djida Tazdaït, une des fondateurs de l’association des Jeunes Arabes de Lyon et banlieue (JALB) et toujours en politique je crois. Et j’ai gardé le souvenir d’une génération de battantes qui défendait leur indépendance fièrement acquise. Au moment de la loi sur le foulard à l’école, elle en défendait le principe pour aider à les jeunes filles à ne pas retomber sous le joug de cette tradition.
L’autre jour sur France Inter l’émission « Affaires sensibles » portait sur cet épisode du foulard à l’école de 1989. Je vous recommande les 20 dernières minutes de l’émission, le commentaire de Thomas Deltombe, journaliste et essayiste, il est notamment l’auteur de « L’Islam imaginaire, la construction médiatique de l’islamophobie en France, 1975-2005 » publié aux éditions La découverte.
Il analyse avec finesse comment certains partis politiques et intellectuels ont fait monter ce thème dans les médias et utilisé/détourné la laïcité pour relayer ce qui relève en fait du racisme anti arabe.
Je ne nie pas l’augmentation de cette pratique dans le domaine public, la montée de l’intégrisme et son impact sur la polarisation du débat public. Mais plutôt que de vouloir « aider ces jeunes et moins jeunes musulmanes » – expression qui me semble un peu condescendante – ne vaut-il pas mieux approfondir les ressorts sociaux et sociétaux de ces changements, échanger avec les associations de musulman(e)s laïques ou non qui œuvrent à les combattre et les soutenir quand l’occasion s’en présente. Claire JOANNY
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Bonjour Daniel,
Je suis tout à fait à d’accord avec toi.
Pas mal de choses se mélangent entre la religion, la culture, la mode, la recherche d’une identité avec l’affirmation de soi.
Comment accompagner ces jeunes filles à faire leurs propres choix sans qu’elles soient trop obnubilés par les médias, la mode ou un certain mode d’oppression religieuse. Pas facile. Peut-être leur apprendre à être curieuse sur ce qui existe en terme d’expression et d’affirmation de soi, de rencontrer des gens différents et qui pourraient être épanouissant pour chacun.
Au plaisir de te lire, (roooh, je tutoie, tant pis)
Vivien
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