… ce que je crois …

l’interpellation d’une amie athée m’oblige à faire, en quelque sorte, profession de foi

à propos de l’expérience spirituelle d’Eric Emmanuel Schmitt dans la nuit de feu, dont je lui ai conseillé la lecture, elle me dit : « j’ai tendance à penser que les illuminations mystiques sont provoquées par tout ce que l’on ignore de notre cerveau »

ce sera difficile d’en parler en 300 mots ; on voudra bien pardonner cette entorse à la règle

par ailleurs, je ne représente rien et ce texte n’est validé par personne … sinon par Régine, comme tous les autres …

parmi tous les possibles – ils sont nombreux – je me réfère principalement – outre la Bible elle-même – à 2 livres : pour l’Ancien Testament la Bible dévoilée d’Israël Finkelstein et Neil Asher Silberman et pour le Nouveau Jésus, approche historique  de José Antonio Pagola ; l’un et l’autre font le point sur ce que les recherches historiques, exégétiques et archéologiques nous disent des histoires qui fondent la foi des chrétiens

j’évoquerai aussi le Christ philosophe de Frédéric Lenoir

l’Ancien Testament

s’il n’y a plus, parmi les croyants, que les intégristes (musulmans, chrétiens, juifs …) pour dire – et peut-être croire –  que Dieu a créé le monde en 7 jours, beaucoup pensent que les autres récits de la Bible sont inspirés de faits historiques

or, on sait – cf. la Bible dévoilée – que – par exemple – les premiers livres de la Bible n’ont été mis en forme qu’au 7ème siècle avant J C, que l’Exode n’a laissé aucune trace repérable dans le désert du Sinaï et que David et Salomon, s’ils ont existé, n’ont pas été les conquérants ou les bâtisseurs décrits

si ce récit mythique n’est pas à proprement parler historique, c’est l’histoire d’un peuple, un texte qui accompagne une civilisation dans sa création et en invente les concepts fondateurs : l’homme à l’image de Dieu – donc l’égale dignité de chacun -, l’homme – tout homme – capable du mal (le «péché originel»), le repos du 7ème jour, les 10 commandements, les préceptes qui règlent la vie de la société et tant d’autres …

et puis je me plais à penser la Bible comme un conte dont seul le sens importe : un peuple, peu à peu, se découvre un Dieu unique et s’efforce, dans les vicissitudes, de le suivre ; conte inspiré ou fruit de l’imagination de l’homme, bornons-nous à constater, à ce stade, que le message s’affine au fil des siècles

Dieu et la science

la science nous dit que l’univers naît du Big Bang ; j’ajoute qu’il naît du Big Bang et d’une règle du jeu – sans laquelle le monde ne serait pas

quant à l’origine du Big Bang … rien ! qu’on l’appelle Dieu ou le Hasard, ce rien ce n’est pas rien

l’univers a suivi la règle du jeu et nous en sommes à la situation présente ; rien ne permet de dire que l’évolution est terminée et que l’homme d’aujourd’hui en est l’aboutissement

parce que nous avons des voitures quand nous avions des calèches et parce que nous connaissons et Aristote et Sartre, nous savons que l’Histoire a un sens, que l’homme d’aujourd’hui n’est ni celui d’hier ni celui de demain – cf Theilard de Chardin, cité ici en mai 2014, article fin du Monde …

alors, moi aussi, comme mon amie athée, «j’ai tendance à penser que les illuminations mystiques sont provoquées par tout ce que l’on ignore de notre cerveau» : pourquoi Dieu, s’il existe, s’affranchirait-il de la règle du jeu ?

mais savoir que nous ne savons pas tout ne fait pas disparaître la question de Dieu

Jésus dans l’Histoire

Jésus est un évènement – qu’il me pardonne le qualificatif – historique qui n’est nié par personne ; il est né en Galilée ; sa vie s’est déroulée dans les 30 premières années de notre ère ; il a prêché – avec un certain succès – a été condamné à mort et exécuté par les romains

quelques uns de ses disciples ont affirmé l’avoir vu vivant après sa mort et ont fondé une Eglise sur cette expérience spirituelle

cette Eglise a contribué au premier chef à modeler le monde occidental

tout cela c’est de l’Histoire

les Evangiles, qui disent Jésus, ont été écrits d’environ 20 ans à un peu plus de 55 ans après sa mort ; ils sont le fruit des récits de témoins directs, d’une tradition orale très récente et  d’interprétations théologiques des évènements liés à la vie de Jésus

le livre Jésus, approche historique fait le point de ce qui, dans ces récits, a un caractère historique et de ce qui relève d’autres logiques ; c’est, pour ma foi, un texte fondateur

Jésus, prophète moderne

Jésus a d’abord été un prophète comme les autres – d’hier et d’aujourd’hui – : porteur d’idées novatrices, il l’a payé – comme beaucoup de prophètes – de sa vie : les romains n’ont pas aimé le fauteur de troubles et les responsables juifs le contestataire religieux

dans le Christ philosophe, Frédéric Lenoir dit en quoi Jésus a été novateur – place des femmes, rapport à la violence et pardon, séparation des pouvoirs, attitude envers les pauvres … – je n’y reviens pas, son livre suffit

la civilisation dans laquelle nous vivons lui doit beaucoup – dans ce qu’elle a de positif – n’en déplaise à certains

jusqu’ici, pour ce qui concerne Jésus, tout le monde, croyant ou pas, peut être à peu près d’accord … sauf évidemment les intégristes  (musulmans, chrétiens, juifs, laïques …)

c’est là que ça se corse, car Jésus n’est pas Martin Luther King ou Gandhi

Jésus … ressuscité ?

la foi des chrétiens repose sur le témoignage de quelques dizaines de personnes ; elles disent l’avoir vu vivant après sa mort

les disciples – y compris les plus proches – qui firent cette expérience spirituelle n’ont, presque tous les textes le montrent, pas reconnu Jésus de prime abord et nous ne savons pas ce qu’ont été précisément ces rencontres

mais elles ont suffit pour qu’ils sortent de leur cachette et prennent la parole en public pour dire : «ce Jésus que vous avez fait clouer sur la croix, … Dieu l’a ressuscité » et ils ont fondé une Eglise sur cette affirmation, convertissant d’abord des juifs puis des «gentils»

j’ai longtemps essayé de comprendre, jusqu’à comprendre qu’il n’y a rien à comprendre : ils ont dit la vérité ou ils ne l’ont pas dite ; on peut leur faire confiance ou on ne peut pas

il ne reste qu’un choix : leur faire confiance ou pas ; ce n’est pas par hasard que les mots confiance et foi puisent à la même source

tout le reste – qui pourra être dit plus tard – est secondaire : comme le dit Paul – l’apôtre converti – aux habitants de Corinthe : «si Jésus n’est pas ressuscité, notre foi est vaine»

Daniel Gendrin

PS : petit calcul de probabilités pour mes amis matheux : l’univers que nous connaissons est le fruit du big bang et de la règle du jeu, tout le monde est d’accord ; est-il plus probable qu’il soit le fruit du hasard ou le résultat d’une pensée ?

… politique économique, mon grain de sel …

très intéressant débat entre économistes français à propos de la Loi dite El Khomri

que du beau linge : prix Nobel, économiste en chef au FMI, Professeurs au Collège de France, à Normale Sup’, à Polytechnique ou dans les plus grandes universités françaises et étrangères

ce ne sont pas moins de 62 personnalités qui ont pris position, dans Le Monde en 3 articles successifs – cf. la synthèse parue dans l’encart Idées du N° daté 19 mars sous le titre évocateur : Clash éco

je vais beaucoup simplifier : le débat est un peu abscons

2 camps :

les «relanceurs» affirment que l’origine du chômage n’est pas à chercher dans le droit du travail mais dans la politique de réduction forcenée des déficits menée dans la zone Euro depuis 2008 ; ils affirment par ailleurs que le gouvernement conduit une opération politique et pas réellement économique ; faute de place, je ne commenterai pas ce dernier point que je ne partage pas

les «libéraux» pensent que simplifier le licenciement sera une incitation pour les entreprises à embaucher en CDI

sur la politique de la zone Euro, il y a des mois que je veux écrire ce que je pense des idées du groupe mené par Piketty et Daniel Cohen – les «relanceurs» : il se trompe

Thomas Piketty, professeur et économiste – par ailleurs journaliste au Monde – nous a écrit 1 000 pages pour expliquer que la croissance, c’est fini et que – faute de prendre certaines mesures qu’il décrit – les inégalités vont croître indéfiniment

je partage cette analyse

mais si la croissance est finie, l’objet même d’une politique de relance est inutile ! … d’ailleurs le Japon cherche la croissance depuis des années à coup de déficits colossaux – et au prix d’une dette abyssale – sans aucun résultat … et ailleurs, la croissance des USA n’est pas si brillante qu’elle puisse servir d’exemple

Piketty se contredit et je suis très surpris de cette incohérence ; il faut, au contraire, s’adapter au monde de croissance faible qu’il décrit si bien

je reviendrai plus tard sur l’adaptation nécessaire en tentant une synthèse de ma pensée

ce qui est sûr, c’est que cela passe par un équilibre structurel des comptes – la croissance ne pouvant plus rembourser les déficits passés – ; entre Piketty et l’Allemand Schaüble, c’est ce dernier qui a raison … je vais encore me faire des amis …

donc les «relanceurs» ont tout faux ; il faut bien prendre des mesures de long terme mais pas rechercher une croissance qui ne reviendra pas

alors la loi El Khomri ?

son objectif n’est pas de créer de l’emploi ; il est de rendre de l’agilité aux entreprises, comme celui du CICE était de leur rendre de la rentabilité

tout ce que fait Hollande depuis le rapport Gallois c’est tenter – sans majorité, ce n’est pas simple – de faciliter la vie des entreprises

quels sont les résultats ? le taux de marge est revenu au niveau d’avant 2008 et les investissements commencent à repartir ; trop tard ? trop lent ? trop peu ? on peut dire ce qu’on veut, le premier résultat attendu est atteint ; l’hémorragie s’interrompt

quant à l’emploi, on en reparlera dans le papier sur l’adaptation du système : si les gains de productivité reprennent la robotisation des tâches tertiaires et que cela ne provoque pas une nouvelle croissance, toutes choses égales par ailleurs, on va vers un immense problème d’emploi ; il faut donc bien changer de paradigme

Daniel Gendrin