Questions de migration

mon ami Christian Juyaux, éminent membre de la CFDT et du Club Convaincre de Lyon me fait passer le texte suivant … il est un peu plus long que la règle ne le permet …

je partage l’essentiel de ses conclusions et publie, dans un article connexe, un complément

Daniel Gendrin

Le démographe Hervé Le Bras, dans son article publié par la Fondation Jean Jaurès ainsi que dans son livre L’âge des migrations (cf la synthèse de Christian) démystifie les fantasmes véhiculés par les forces populistes dans l’espoir de se faire élire

Il rappelle fort justement que nous devons prendre en compte les entrées (émigrés et retour des expatriés) et les sorties (expatriés et retour au pays des migrants) pour connaitre le solde migratoire, lequel en lien avec la croissance économique est une constante des migrations internationales. En 2017 pour la France c’est 58 000 personnes soit moins d’un millième de la population.

La baisse du chômage et le peu de mobilité territoriale en France a pour effet des difficultés de recrutement dans certains secteurs où les conditions de travail sont difficiles, les emplois mal payés et souvent précarisés, mais aussi dans des secteurs très qualifiés comme les hôpitaux et le numérique. Ce sont les raisons pour lesquelles le Premier Ministre parle de quotas au sens d’un appel d’offres dans les métiers sous tension. C’est une constante du patronat soutenu par les politiques libérales d’appeler à la main d’œuvre étrangère quand il ne trouve pas de personnel aux conditions que les entreprises proposent… !

Globalement la population européenne ne devrait pas changer d’ici 2050 (aux environs de 500 millions d’habitants) mais avec de grandes diminutions pour certains pays comme la Bulgarie (-25%), – 15% en Roumanie, Pologne , Hongrie ainsi que dans les pays Baltes et dans une moindre mesure en Allemagne et dans le sud de l’Europe. Dans le même temps la population de l’Europe du Nord–Ouest augmenterait (plus de 10 millions en Grande Bretagne). Cela s’explique par les différences des taux de fécondité de 1,25 au Portugal et 1,3 en Pologne et entre 1,8 à 1,9 dans le Nord Ouest européen. Les pays de l’Est ont des soldes migratoires négatifs du fait du départ d’une partie de leurs concitoyens et du refus d’accueillir des migrants. Une faible fécondité et un solde migratoire négatif a pour effet un vieillissement accéléré de la population. La migration doit être envisagée comme une possibilité d’augmenter le nombre d’actifs et non un remède contre le vieillissement de la population.

D’ici 2050 la population africaine augmentera de 1,2 milliard d’habitants mais avec des réalités différentes selon les zones : Au nord du Sahara la population se stabilise avec une fécondité inférieure à 2,5 enfants par femme. Le Sahel est dans une situation plus critique avec les pays les plus pauvres ayant le moins de terres cultivables et le plus fort taux de fécondité. Les pays riverains du golfe de guinée devraient aussi connaitre une expansion démographique mais dans une croissance économique importante. L’Afrique équatoriale a un des plus forts taux de fécondité mais elle dispose de ressources pour que l’accroissement de la population trouve des débouchés sur place. Traditionnellement les migrants du Sahel se dirigent ver le sud de l’Afrique et le golfe de Guinée ainsi 80% des migrations internationales en Afrique subsaharienne se déroulent à l’intérieur du continent.

Sur les 260 000 titres de séjour distribués en 2018 au plan national, le regroupement familial et la migration étudiante représentent les 2/3. Beaucoup de ceux qui sont entrés au titre de la famille ou de l’asile font ensuite partie de la population active. Pour les demandes d’asile (110 000 l’année dernière) déposées auprès de l’OFPRA (Office Français de protection des réfugiés et apatrides) un tiers seulement sont admises car 30% des demandes correspondent à des personnes qui se sont vu refuser l’asile dans un autre pays et viennent en France pour des motifs de travail. Ainsi 95% des Georgiens et 97% des Albanais sont déboutés tandis que 80% des Syriens sont acceptés. La plupart des refusés restent en France sans papiers  et ils sont tentés par le travail illégal.

L’extrême droite en France a repris le thème du grand remplacement en argumentant que chaque année c’est 190 000 étrangers en plus et 130 000 français en moins, or beaucoup d’étrangers qui émigrent deviennent français à terme mais surtout des étrangers ont des enfants avec des français donnant naissance à une population d’origine mixte. Ainsi si 10% des naissances sont issues de 2 parents immigrés, 60% des naissances n’ont ni parents, ni grands parents immigrés, reste 30% des naissances qui ont dans leur ascendance une origine étrangère. Si l’immigration continue à ce rythme 50% des naissances seront dans ce cas en 2050, ainsi la mixité progresse et l’histoire de la génétique nous informe que c’est une chance pour notre pays….

Les adversaires de l’immigration scandent « On ne se sent plus chez nous » or au regard des votes pour la présidente du Front National au 1er tour des élections présidentielles de 2016, les votes pour ce parti politique qui dénonce l’immigration sont les plus élevés là où les proportions des immigrés sont les moins importantes, a contrario les plus faibles pourcentage du vote FN s’observent dans les grandes agglomérations où les immigrés sont les plus nombreux.

Pour les Nations Unies, les soldes migratoires devraient diminuer légèrement jusqu’en 2050 pour devenir presque nuls en 2100, les migrations pour raisons politiques ou climatiques sont limitées dans l’espace et dans le temps, les vraies raisons d’une augmentation des migrations sont l’élévation du niveau d’éducation en Afrique et en Asie car plus une personne est éduquée, plus sa probabilité de migrer augmente avec l’espoir d’un emploi en rapport avec sa compétence. Si dans les années 1960-1970 les immigrés qui venaient travailler en France étaient peu éduqués voire pour certains analphabètes, aujourd’hui 60% des nouveaux arrivants du Maghreb ont le bac.

La France rencontre des problèmes sociaux avec les enfants et les petits enfants français issus des migrations économiques d’avant les années 80, pas avec les nouveaux migrants qui occupent les métiers les plus dangereux, les plus astreignants et les moins attractifs sur les chantiers du bâtiment, dans les cuisines des restaurants, pour faire le ménage tôt le matin et tard le soir, mais aussi comme médecins à l’hôpital et dans les services de soins.

Les scientifiques (démographes, sociologues, historiens, politologues, etc…) objectivent les réalités de la migration, mais il appartient aux politiques et à la société civile d’agir contre les fausses idées, mais prendront-ils le risque d’aller à l’encontre de l’opinion ?

 Voilà le plaidoyer d’Hervé Le Bras dans son livre « L’âge des migrations ».

En restant à votre disposition, bien amicalement.

Christian JUYAUX

PS les réactions à cet article passent par le site, je les ferai suivre

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