vous avez une fesse sur un coin de table : vous êtes trop nombreux et manquez de chaises dans cette malheureuse salle de classe où vous êtes bouclés un dimanche matin pour célébrer la messe
vous êtes à Corbas, à la maison d’arrêt des femmes
sont là, ensemble, 21 détenues et 5 personnes du dehors
la messe, en général préparée la veille en aumônerie par les détenues, rappelle ce qui se pratiquait autrefois en Action Catholique, après le concile, quand une équipe vivant une situation commune se réunissait pour partager les préoccupations, les textes et le pain
et puis, après la messe, avant que la surveillante ne rouvre la porte, un forum des nouvelles : qui est sorti ? qui va sortir ? qui va être jugée ? comment va telle ou telle qui est dehors ? et, dans la discrétion, des nouvelles des familles, des bonheurs ou des malheurs …
l’émotion surgit souvent au détour d’un texte ou d’une parole et parfois déborde chez l’une ou l’autre tout au long de la messe
mais cette messe-ci est particulière : une détenue communiera pour la première fois
voilà donc cette jeune femme à qui on demande de dire quelques mots pour exprimer ce qu’elle ressent et qui, au cœur du texte qu’elle a préparé, vous annonce : « … mon incarcération est une révélation … »
vous apparaît alors lumineuse la parole attribuée au Christ par Matthieu : « … je te bénis, Père, d’avoir révélé cela aux tout-petits … »
Daniel Gendrin