le livre de Thomas Piketty Capital et idéologie a déjà plus d’un an
c’est un pavé bien écrit, facile à lire – passé le ton professoral – extrêmement documenté et qui complète efficacement son livre précédent
mon commentaire ne vise pas à l’exhaustivité : il ne relève que ce que j’en retiens ; il fera, cette fois encore, l’objet de plusieurs articles, le présent résumant les quelques idées qui ont fixé mon attention et qui seront détaillées plus loin
d’autres commentaires d’autres auteurs pourront être publiés ici … avis aux amateurs …
le sujet de Piketty ce sont les inégalités ; il les a dénoncées et en a écrit l’histoire dans Le capital au XXIème siècle,abondamment commenté ici en son temps
il y montre qu’avant la Première Guerre mondiale elles atteignent des niveaux extravagants, qu’elles déclinent fortement ensuite avant que la révolution conservatrice des années 70 ne leur redonne du tonus,
démontre que ce mouvement n’a aucune raison naturelle de s’interrompre et que l’intervention du politique seule peut les empêcher de retrouver leurs niveaux monstrueux d’il y a à peine 100 ans
enfin il y propose de revenir à une fiscalité progressive du patrimoine et des revenus
avant de commencer, 3 incises de mon cru :
- lorsque le patrimoine des riches – pondéré de sa part dans la richesse nationale – croît plus vite que celle-ci, les autres s’appauvrissent ; c’est la limite de la théorie du ruissellement (démonstration en annexe) *
- nous vivons dans un pays moins inégalitaire que presque tous les autres et dans lequel si les inégalités de patrimoine croissent, celles de revenu varient peu
- la question n’est pas seulement morale : l’accumulation de la richesse remet en cause la distribution du pouvoir et la démocratie ; la volonté manifestée par Bolloré de se construire un empire de communication à l’image de celui de Murdoch en monde Anglo-Saxon, avec les conséquences que l’on sait – élection de Trump et Brexit entre autres – montre assez le danger que fait courir la dérive des inégalités à la démocratie
qu’apporte de neuf ce livre ?
dans tout ce foisonnement, je ne retiens que quelques flashes en autant d’articles
- les inégalités, une origine culturelle
- le comble : l’esclavage
- éducation et productivité
- la social démocratie, tentative – réussie – de réduction des inégalités … et ses limites
- des pistes pour changer la donne
- suivra un article où je donnerai quelques avis
NB : dans mon résumé, je fais l’hypothèse que les faits énoncés par l’auteur sont exacts ; je n’ai pas la culture encyclopédique qu’il faudrait pour trancher sur cette multitude d’informations ; si tel ou tel point devait être contesté – il y en a inévitablement – cela ne change rien à la vue d’ensemble
Daniel Gendrin
annexe : la théorie du ruissellement questionnée
ou : quand les riches s’enrichissent, les autres s’enrichissent-il ?
soient : pour l’année n
- xn le patrimoine global
- y son pourcentage de croissance
- Pn le patrimoine, exprimé en % du patrimoine global, possédé par une partie de la population
- z la croissance de cette partie du patrimoine
- x’n sa valeur
- x»n la valeur du patrimoine de tous les autres
nous raisonnons de l’année 1 à l’année 2
et nous cherchons à connaître la variation du patrimoine de tous les autres
nous cherchons donc : x»2 – x»1
or, x»1 = x1 – x’1 = x1 – P1*x1= (1 – P1) * x1
et x»2 = x2 – x’2
où x2 = (1+y) * x1
et x’2 = (1+z) * x’1
donc x»2 = {(1+y) * x1} – {(1+z) * x’1} = {(1+y) * x1} – {(1+z) * P1 * x1}
x»2 = x1 * (1 – P1 + y – P1 * z)
et x»1 = (1 – P1)* x1
donc x»2 – x»1 = x1 * (1 – P1 + y – P1 * z) – (1 – P1)* x1
au bout du compte : x»2 – x»1 = x1 * (y – P1 * z)
donc les pauvres s’enrichissent si et seulement si la croissance du PIB (y) est supérieure à celle du patrimoine des riches pondérée de leur poids dans le patrimoine global (P * z)
par exemple
si la croissance à venir est de 1 % par an
et si le patrimoine des 10 % les plus riches croît de 4,5 % par an *
alors que les 10 % les plus riches possèdent 50 % environ du patrimoine global
dans ce cas y = 1 %
z = 4,5 %
p = 50 %
et, dans ces hypothèses – très actuelles –, le patrimoine de 90 % de la population diminuera de (1 – 4,5*,5) = 1,25 % par an
* selon l’INSEE, le patrimoine brut du dernier décile s’est accru de 4,5 % par an de 1998 à 2015
Intéressant, comme d’habitude ! Merci debout repris tes publications 🙂
Remarque sur l’annexe : ton raisonnement est basé sur les taux de croissance de patrimoine, mais tu prends le taux de croissance du pib dans ton exemple. Sur le site de l’Insee, je vois 107% de croissance de patrimoine entre 1998 et 2015, soit 4,3% par an. Du coup, le patrimoine des 9 premiers déciles augmente quand même.
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merci du commentaire
en fait je m’étais aperçu du biais et j’ai seulement oublié de corriger la phrase « donc les pauvres … le patrimoine global (P * z) » :
dans la formule, « y » est bien la croissance du patrimoine et pas celle du PIB ; si l’on prend les hypothèses – réalistes – de l’exemple (avec une croissance à venir du patrimoine de 1% / an), le patrimoine des 90 % va bien diminuer
par ailleurs, sur le long terme et hors phénomène – forcément temporaire – de bulle financière, je ne vois pas comment le patrimoine peut croître plus que la production
Daniel
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