nous avons vu que, selon Piketty c’est la déification de la propriété privée qui conduit à l’accroissement des inégalités ; la problématique est culturelle, ou idéologique, comme on voudra
le comble de la sacralisation de la propriété – et celui des inégalités de traitement – est dans la chosification de la personne humaine
dans une société esclavagiste, une partie – parfois très majoritaire – de la population est constituée de biens meubles dont le propriétaire jouit à sa guise
Thomas Piketty y consacre un long développement parce que c’est l’extrême situation d’inégalité et aussi parce qu’avec celles de la colonisation qui a suivi, les conséquences de l’esclavage se font sentir encore aujourd’hui
je n’en retiens ici que 2 aspects : l’ampleur de la traite des noirs par nos ancêtres récents – entre 3 et 4 siècles – et la façon dont on a cru bon de résoudre le problème lorsqu’il a fallu en sortir
d’abord une citation : « on estime que {les traites africaines} ont concerné … autour de 20 millions d’esclaves entre 1 500 et 1 900 dont les deux tiers au titre de la traite atlantique … et un tiers pour la traite transsaharienne …, organisée par les États et les marchands européens, arabes et africains… »
quand on sait que la population moyenne sur la période est de l’ordre de 50 millions d’individus … c’en est donc une part très substantielle qui a été ponctionnée ; les conséquences en terme de développement, pour être incalculables, sont évidemment colossales : ce ne sont pas les vieux et les malades que l’on a déportés …
et lorsqu’il a fallu arrêter cette abomination, ce sont les propriétaires d’esclaves que l’on indemnisa … et parfois par les esclaves eux-mêmes : en 1825, la France impose à Haïti, comme prix de l’indépendance, une dette équivalant à 3 fois sa production annuelle, dette qui ne sera éteinte qu’en 1950 ; voilà qui éclaire d’une lumière crue les difficultés récurrentes de l’île
une étrange façon, pendant 4 siècles, pour des nations se disant chrétiennes, de traiter son prochain
Daniel Gendrin