dans l’article précédent, j’annonçais mon intention de commenter 3 papiers : un éditorial du Monde qui présente démographie et immigration comme deux tabous du débat, un décryptage de la réforme par la CFDT et un article d’Olivier Mériaux
sur l’éditorial de Philippe Bernard
la démographie et l’immigration, des tabous du débat
si le solde naturel baisse (comme c’est le cas en Chine, en Russie ou au Japon mais aussi en Italie et en Hongrie, entre autres …) et qu’en parallèle on bloque l’immigration, on n’aura plus personne pour payer nos retraites
laissons parler Philippe Bernard : « la publication du bilan démographique de l’Insee, mardi 17 janvier, en pleine controverse sur les retraites, met en lumière la fragilité de notre précieux système par répartition basé sur la solidarité entre actifs et retraités … »
laisser croire que cela n’aura pas de conséquences – et pas seulement sur l’âge de départ en retraite – c’est raconter des sornettes
sur le document de la CFDT
on sait la tendresse que j’ai pour ce syndicat et le respect que j’ai en général pour ses analyses
l’intérêt de ce document est qu’il présente de manière très claire les avancées (en vert) , les points de statu quo (en bleu) et les reculs sociaux (en rouge) de cette réforme ; grâce à lui chacun pourra se faire une idée de l’ensemble et constater que la négociation a payé
je partage avec la CFDT le regret de l’abandon de la retraite par points ; cela a failli passer et si Édouard Philippe n’avait pas, au dernier moment, voulu imposer le recul de l’âge de départ, cela passait ; intentionnellement ou pas, il a saboté la réforme
mais je ne partage pas l’affirmation, s’agissant du projet : « … il est injuste principalement parce qu’il fait reposer l’effort uniquement sur les seuls travailleurs, … » ; parbleu ! sur qui veut-on que cela repose ?
sur les retraités ? qui l’aurait voté ? la droite ? bien sûr que non, c’est tout ce qu’il leur reste comme électeurs … la gauche ? certainement pas, elle se cantonne dans une opposition systématique … et puis souvenez-vous du tollé soulevé par Macron lorsqu’à peine élu il avait tenté de les taxer …
sur les entreprises ? trop facile ! car on sait bien, quand cela ne les fait pas fuir, sur qui ça retombe au bout du compte : les salariés, encore eux, ou les clients ; taxer les entreprises, c’est un jeu à somme nulle voire négative
sur les actionnaires ? oui, ce serait juste, bien sûr, mais dans une Europe sans harmonisation fiscale ils ont vite fait de délocaliser chez le voisin ; on ne peut pas se lamenter sur la désindustrialisation et pousser le capital à fuir en Belgique ou en Allemagne …
sur le document d’Olivier Mériaux
celui-ci nous dit « reculer l’âge légal sans avoir obtenu de résultats tangibles en matière d’emploi des seniors est hypocrite et dangereux » ; la remarque est juste et l’emploi des seniors est la clef
mais il est un troisième tabou dans ce débat, tabou au point qu’on hésite à le lever : si les grandes entreprises font partir les seniors avant l’âge, c’est parce que cela arrange tout le monde : l’entreprise, qui dégraisse ou rajeuni l’effectif – réduisant ainsi la masse salariale – et les seniors trop contents de partir en anticipation de la retraite, le plus souvent via les caisses de chômage
cette mécanique, qui fonctionne depuis des décennies, explique l’essentiel du faible taux d’emploi des seniors et c’est là qu’intervient la modification de l’indemnisation du chômage : elle y introduit un fameux grain de sable
désormais les salariés, moins indemnisés, n’auront plus intérêt à partir tôt et les accords de départ anticipé, s’il en reste, seront négociés par les syndicats à d’autres conditions
c’est comme cela que le gouvernement pense accélérer l’emploi des seniors ; ce n’est pas pour rien qu’il a fait passer la réforme de l’indemnisation du chômage avant celle-ci
NB : c’est une illusion de croire que les Français pourront de toute éternité travailler moins d’heures dans leur vie que les Belges ou les Allemands sans que leur niveau de vie décroche : rappelons-nous que si le revenu national brut par habitant des Français était le même que celui des Allemands il y a 20 ans, l’écart est maintenant de 16 % …
Daniel Gendrin
PS une autre solution pourrait être d’augmenter la population active, par exemple par l’immigration …
Les gens veulent travailler moins et gagner plus. Je les comprends. Et qui leur dit qu’il faut choisir ? Avec les centaines de milliards de dettes en plus du quoi qu’il en coûte, toujours pas de signes qui les y pousse. L’inflation est pourtant là ! (qui est bien la marque d’une surconsommation (pouvoir d’achat) par rapport à l’offre (le travail) ). Mais c’est la faute de la guerre en Ukraine et du covid en Chine. On est mal barré…
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